Quand la danse se libère...

Danse Singulière - 3 mai 2024

Assises en cercle, nous sommes dix. La plus grande partie se sont mes élèves, et l’autre, d’anciennes élèves qui ne reviennent qu’à cette occasion. Ce dispositif offre cette liberté là, d’y être quand on peut. Je les connais toutes, et pour la plupart depuis qu’elles ont 4 ans. Le groupe se constitue de trois enfants de 8 ans, et les autres de 11 à 15 ans. Je recherche le mélange d’âges… 

Nous commençons par danser ensemble dans l’espace, ça tournoie, les regards se croisent, une certaine joie empreint les airs de rencontres. Les trois petites restent ensemble dans un coin de la salle avec de simples gestes de bras, le regard rivé sur le mouvement des grandes… et moi, je danse avec mes petites.

Nous entrons dans le 2ème temps, elles s’assoient dans les bords de la salle pour écouter un extrait des quatre propositions musicales + le silence. C’est le temps des danses individuelles improvisées au coeur de la scène, sous le regard des autres. Ce moment s’ouvre avec une danse d’une de mes plus ancienne élève, elle prend la musique que je crois la plus difficile, cependant ne semble pas être gênée par les changements de rythmes. Ses mouvements sont fluides et en accord, comme si son corps s’accordait simultanément à la partition. Surprenant et beau !

Accroupie sous la barre de danse classique, M. me demande le morceau numéro un, se lève et se place au milieu de la scène. Assise au sol, les genoux repliés, sa tête posée dessus. Les premières notes de musique nous révèlent ses doigts qui me saisissent le regard,  je ne peux plus décrocher, je suis prisonnière, capturée, empoignée, ma respiration n’a qu’un souffle… l’éphémère intensité de cet instant… La rondeur, la force de ses mouvements, cette façon qui lui est propre de s’élancer dans les airs sans aucune crainte de tomber… comme si tout son être conspirait avec l’univers et que son corps se fondait de manière organique à l’invisible… Cette danse frôle quelque chose de l’irréel, et d’une liberté absolue ! Comme s’il n’existait plus aucune frontière entre le corps et la danse, et qu’il ne restait que la DANSE ! 

Elle me dérobe les larmes cachées de mon coeur, de toute cette liberté qu’au fond d’elle, elle a su préserver...

Petite anecdote, du premier atelier de Danse Singulière de M., (écrit le 23.03.2016), à l’époque elle n’avait que 5 ans:  "Et là, à ma surprise, une enfant choisit le silence, sa danse est magnifique, ses gestes harmonieux, à un certain moment elle remet son pouce dans la bouche (comme quand elle était assise dans les bords en regardant les autres danser), et le retire aussitôt avec un petit sourire, elle est complètement dans sa danse". 

Le deuxième temps se poursuit d’une alternance de danses solitaires et à plusieurs. Ce qui touche mon regard, c’est que les plus petites à chaque fois qu’elles vont danser au milieu, leur danse est de plus en plus ample. Les timides mouvements de bras du début de l’atelier, deviennent de plus en plus grands, hasardeux, et elles s’élancent toujours plus loin, s’assurant par coup d’oeil que les plus grandes les regardent !

Et nous, le sourire aux lèvres, elles nous rappellent d’où nous venons.. le pays de l’enfance avec toute sa candeur, sa vérité et sa pureté.

Je serai toujours du côté de l'enfance,
le lieu sûr
d'où nous prendront notre envol ! 

Écrit, mai 2024

Giuseppina

 

 


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