A quel âge peut-on commencer les pointes ?

La danseuse sur pointes fascine par l’image éphémère qu’elle nous renvoie...
Telle une rêverie qui ne toucherait terre elle nous raconte l’histoire d’un ballet où tout paraît facile !
Et pourtant…
 

S’il n’y a pas d’âge précis pour commencer les pointes, il est fortement déconseillé de commencer avant l’âge de 12 ans. Mais l’âge n’est pas le seul critère à prendre en compte, il faut observer le stade de développement physique de l’élève, soit : 

  • Les caractéristiques musculaires de son tronc (qui doivent être solides).
  • Le maintien des muscles abdominaux et pelviens (stabilité de base).
  • L’alignement des jambes (hanche-genou-cheville-pied).
  • La force et la souplesse des pieds et des chevilles.
  • La durée et la fréquence des entraînements.

Pour les élèves qui correspondent à ces critères et qui suivent des cours de danse classique au moins deux fois par semaine depuis quatre ans, il est envisageable de commencer le travail sur pointes en toute sécurité. Cette initiation débute par 15 minutes d’exercices à la barre, à la fin de chaque classe.


Quelques mots sur le développement et la croissance
L’ossification du pied de l’enfant, c’est-à-dire le passage d’une ébauche cartilagineuse en os, est un processus parfaitement programmé et très lent. En effet, il débute vers le 3ème mois de la vie intra-utérine pour se terminer à l’âge de 14ans chez les filles et 16ans chez les garçons.
A quel point  se trouve la maturité osseuse d'une jeune fille de 12ans ? Les connaissances statistiques moyennes ne sont pas précises puisque l’âge chronologique n’est pas nécessairement en corrélation avec l’âge osseux.
Si la croissance des os dans le pied n’est pas tout à fait achevée à l’âge de 12ans et que les filles commencent les pointes, on pourrait se poser la question s’il existe des preuves médicales sur les dommages causés aux os du pied en croissance ? A ma connaissance, il n'existe pas d’études ou de comptes rendus d’expériences personnelles témoignant à ce sujet. Par contre en analogie, des études impliquant des gymnastes ont établi le préjudice potentiel des microtraumatismes répétées sur la croissance des os.
Si ni l’âge, ni la maturation osseuse sont à même de déterminer le moment où le travail sur pointes peut commencer, quels autres facteurs doivent être pris en considération ?
Dans la cinquième (et dernière) édition de son livre « Anatomie et Ballet : Un manuel pour les professeurs de Ballet. Celia Sparger écrit : « On ne soulignera jamais assez que le travail sur pointes est le résultat final d’un entraînement long et graduel sur l’ensemble du corps, ( dos, hanches, cuisses, jambes, pieds, coordination des mouvements et placement du corps). Le poids du corps est soulevé par les pieds en passant par la demi-pointe sur les pointes en tenant les genoux tendus et en équilibre parfait. Les pieds ne doivent ni pencher vers l’intérieur ni vers l’extérieur, et les orteils ne doivent pas se tordre ou s’agripper. Ces conditions arriveront à des moments différents pour chaque enfant. Non seulement en raison de la formation qu’il a reçue, mais en fonction de leur type physique et de leur croissance osseuse ».


Quels sont les risques liés à l'initiation des pointes trop tôt ?
Les dangers potentiels pour l’enfant placé sur pointes avant qu’elle ne soit prête n’est pas d’endommager ses os et articulations (même si le risque existe) que de faire des mouvements inadéquats par le manque de force et de stabilité. Ces facteurs de risque peuvent causer un stress inutile sur la jambe, la ceinture pelvienne et le tronc. Le pied est une architecture sophistiquée et fragile. Il est constitué d’une mosaïque de cartilage, et tant que l’enfant n’a pas atteint sa puberté, ces structures restent particulièrement sensibles aux microtraumatismes.  
Il faut noter aussi que l’enfant avec une hyperlaxité des pieds et des chevilles est particulièrement à risque si elle est placée trop tôt sur les pointes. Ces élèves ont la souplesse pour atteindre, voire même dépasser la position requise pour monter sur les pointes, et sont donc plus susceptibles d’être sélectionnées pour le ballet et en particulier pour les pointes. Toutefois, il leur manque souvent la force nécessaire et le contrôle postural pour travailler en toute sécurité sur les pointes. Avant de commencer le travail sur pointes avec de telles élèves, tous les muscles de la jambe doivent être renforcés, et un contrôle adéquat des capacités *proprioceptives doit être fait pour faciliter l’alignement correct.
Dans le cas contraire, une élève avec un pied et une cheville très peu flexible (flexion plantaire insuffisante), se trouve être également à risque. Pour assurer un bon alignement sur les pointes, la ligne des métatarsiens (représenté par la surface supérieure de l’avant-pied) doit être parallèle à la ligne du tibia (à l’avant de la jambe), quand le pied est pointé (flexion combinée de la cheville et de la voute plantaire). Tenter d’effectuer un travail sur pointes sans les aptitudes anatomiques décrites ci-dessus, entraînerait des contraintes excessives, non seulement sur le pied et la cheville, mais aussi sur la jambe, la ceinture pelvienne et le tronc.


Évaluation des élèves durant le travail avant les pointes
L’un des facteurs qui influence le développement de la force musculaire et de la capacité proprioceptive est l’âge auquel l’enfant a commencé à étudier le ballet. L’enfant peut commencer la danse à l’âge de 4ans par des initiations au mouvement. Par contre la véritable formation de danse classique ne peut pas commencer avant l’âge de 8 ans. Un autre facteur est aussi le nombre d'entraînements suivis par semaine.
Le professeur a la responsabilité de prendre en compte la croissance et le développement de chaque élève. Il doit effectuer sa propre évaluation pré-pointes, de manière à vérifier si l’élève a un bon contrôle postural, une force suffisante des jambes, ainsi qu’un bon alignement (hanche, genoux, cheville, pied), afin de commencer à travailler sur pointes.


Conclusion 
Monter sur nos pointes de pieds n’est pas à prendre à la légère. Il est donc impératif que toute la structure du corps soit prête à recevoir ce travail. Je pourrais le comparer à une mécanique de précision, chaque muscle est façonné dans la direction de pouvoir soutenir le corps, afin que nos pieds soient épargnés d’une partie de notre poids.
A vos pointes, mais avec conscience !

* Perception, le plus souvent inconsciente, que l'on a de la position de son corps dans l'espace. La proprioception assure l'équilibre, le contrôle des mouvements et nous renseigne sur l'activité de notre corps. (On dit aussi Sensibilité proprioceptive.)

Giuseppina Manta    


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